I remember it well
C’est un début d’après midi favorable aux souvenirs. Quand je pense à mon enfance, je n’y trouve que quelques brides, par ci par là, tout est mélangé. Je crois que mon premier souvenir, date de l’école maternelle. Mes 4 ans peut être. Mon père nous conduisait à l’école mon frère et moi, dès qu’il le pouvait. Je pense que quand il ne travaillait pas, c’était le matin, puis le midi. Le reste je ne sais pas. Je n’ai pas de souvenirs de ma mère qui nous accompagne à l’école. Il marchait toujours trop vite pour moi. Mon frère arrivait à le suivre, et moi j’étais derrière avec mes petites jambes, ma jupe plissée, les sandalettes, le palmier sur la tête, la chemise vichy et mon goûter dans le papier d’alu. Je leur demandais de ralentir, ça les faisait rire tous les deux, puis moi aussi, parfois, parce que la main de mon père semblait me faire voler derrière lui. Quand on arrivait dans la longue allée qui mène à la porte de l’école, il nous lâchait la main. Mon frère courrait voir ses copains, j’essayais de le suivre, mais dès qu’on voyait que la porte de ma classe approchait, on s’arrêtait, et allait rattraper la main de mon père. C’était toujours moi la première à aller en classe. J’avais la main droite, mon frère la gauche (aujourd’hui, on ferait le contraire, je pense…). Et je revois mon père nous changer de main, et dire qu’aujourd’hui je vais dans la classe des grands, et Alexandre dans celle des petits. Et ça me faisait éclater de rire, parce que la tête que faisait mon frère à ces moments était très amusante. Puis finalement, on entrait dans le petit couloir, c’était bien mes affaires que je déposais sous mon nom, je me cramponnais à la main de mon père jusqu’à l’entrée de la grande pièce pleine de petites chaises et tables, puis j’attendais qu’il s’abaisse pour que je puisse lui faire un bisou. A ce moment, j’avais droit à la grimace de mon frère qui semblait me dire « tiens, tu vois, toi t’es chez les petits, moi je vais quand même chez les grands ». Quand j’y repense, cette classe avait une odeur très particulière que je sens encore parfois mais que je n’ai jamais retrouvée. Mais c’est probablement parce qu’elle se combinait très bien à la douceur de ma première institutrice. J’ai beaucoup de souvenirs de l’école maternelle. Je me souviens exactement de mes institutrices, je me rappelle de leur voix, les raisons pour lesquelles elles criaient parfois, puis le premier mauvais coup que j’ai fait à un garçon, profitant qu’il était amoureux de moi pour lui donner l’occasion de se faire disputer. S’il m’aimait vraiment, il fallait qu’il dise que ce soit lui le dernier qui avait utilisé le savon et qu’il l’avait laissé fondre dans l’eau. Il ne devait pas dire que c’était moi. Alors, il aurait un bisou. Le pauvre s’est fait disputer, punir, et je n’ai plus jamais voulu lui parler ! Et les souvenirs continuent bien après l’école maternelle. On était allé avec la classe entière de CP chez mes grands-parents. Alors, les élèves avaient fait leur tout premier livre, celui avec lequel ils avaient appris à lire/écrire sur mon grand-père et j’en étais très fière. Il nous avait expliqué comment se faisait le fromage de chèvre, comment il faut nourrir les bébés, comment tenir les biberons, avait montré comment il fallait traire la chèvre, m’avait demandé de leur montrer l’exemple et j’étais monté sur mon petit tabouret pour tous les épater, le maître y compris. Ensuite, c’est ma grand-mère qui avait pris le relais, elle nous avait fait des gâteaux et de la citronnade bien fraîche. Ma classe n’était que le début pour mes grands parents, encore quelques années après ils accueillaient plusieurs classes par semaine dans leur petite ferme, et ça leur allait très bien. En CE1, j’avais été enfermée dans l’immense placard du fond avec Phillipe, et on rigolait tellement tous les deux, que j’avais fini par faire pipi dans ma culotte et rigoler de plus belle. Quand j’en reparle à amie qui était dans ma classe à l’époque, elle me dit qu’elle s’en souvient, que mon rire était déjà très spécial, et que c’est là qu’il l’avait le plus marqué. Que j’avais été mise là bas parce qu’on était voisins lui et moi et qu’on avait tellement ri que ça avait énervé notre instituteur. Il nous a d’abord crié dessus, et ça n’avait pas marché. Il était très en colère quand mon rire perçait à travers la porte du placard et amusait les autres, mais n’a rien fait de plus. En CE2, j’avais trouvé le mot le plus long. C’était le premier jour, et on a commencé par ce jeu. C’est mon ardoise qu’elle a ramassé pour montrer à tout le monde que j’avais gagné. En CM1, j’ai hérité d’un surnom complètement débile qui m’a suivi pendant mes deux dernières années. L’instit du moment avait comme habitude d’allonger les filles sur ses genoux et de leur mettre la fessée quand elles faisaient quelque chose de mal. Je n’aimais pas trop ça. Et les garçons, il les prenait par le col, et les soulevait jusqu’à la hauteur de son visage. Et il était immense. Eux ils aimaient ça ! Puis, en CM2, j’étais amoureuse de mon instit. Il était vraiment charmant. Hum, il l’est toujours d’ailleurs, je le croise encore quand il fait son jogging, on s’échange toujours des grands signes. Puis après, le collège, le lycée, tous les à côtés qui changent pas mal de choses dans la vie d’une jeune fille…
Mais au-delà des souvenirs d’école, il y a ceux de la famille. Et là c’est beaucoup plus confus. Je suis incapable de classer selon la date. Je sais qu’on allait les mercredis chez mon parrain, après avoir mangé chez ma grand-mère. On était cinq, parfois six. Sa femme nous faisait dessiner, nous emmenait nous promener, nous laissait pousser la poussette avec son bébé dedans, on revenait manger une glace ou une mousse au chocolat qu’elle avait faite la veille à la maison, puis on accrochait nos dessins sur les murs de sa cuisine, on repartait sales et fatigués. Mais des après midis chez mes grands parents, il y en a eu, aussi. On pouvait parfois être huit là bas. Je pense que c’est de là que viennent tous les liens que j’entretiens aujourd’hui avec tous mes cousins et mes cousines. Il y avait des clans avec ceux qui s’y retrouvaient systématiquement, mon cousin, sa sœur, une autre cousine, mon frère et moi. Les deux cousines aînées s’occupaient de la petite dernière, et mon cousin et moi on restait tous les deux, et comme elles ne voulaient pas qu’on approche le bébé, on se moquait d’elle, et ça nous faisait bien rire. Mon frère était le gardien des filles, et parfois, pour nous empêcher de les approcher quand elles étaient installées quelque part, il venait se battre avec nous. Puis mon grand père a fini par installer une balancelle dans le grenier de l’étable. Accrochée à une énorme poutre, avec de grosses ficelles usées, au dessus de l’enclos des chevaux, en plein milieu de la paille. On pouvait s’y installer tous ensemble, et ça réglait bien des choses. On avait tout déménagé là haut. Les jouets, de la vaisselle, nos goûters, nos devoirs. Quand on arrivait, on faisait le bisou pour dire bonjour aux adultes, puis on filait dans notre maison. On y était bien, et parfois, on restait des journées entières au dessus de tout le monde, jouant à tout et n’importe quoi, improvisant d’immenses cache cache dans les ballots de pailles qui nous donnaient les jambes toutes rouges et griffées et nous faisaient pleurer sous la douche du soir, et qui en plus, mettaient mon grand-père en colère parce qu’on enlevait les ficelles et que c’était très mal.
Alors, aujourd’hui, avec ces souvenirs, et il y en a encore beaucoup, je me dis que quand même, la période de mon enfance était très agréable, et elle me laisse aujourd’hui un goût très doux dans la bouche. Parce que même s’il n’y avait rien d’extraordinaire, je me rends compte que la simplicité était bien suffisante, et je crois que ça, je saurai m’en souvenir…
Mais au-delà des souvenirs d’école, il y a ceux de la famille. Et là c’est beaucoup plus confus. Je suis incapable de classer selon la date. Je sais qu’on allait les mercredis chez mon parrain, après avoir mangé chez ma grand-mère. On était cinq, parfois six. Sa femme nous faisait dessiner, nous emmenait nous promener, nous laissait pousser la poussette avec son bébé dedans, on revenait manger une glace ou une mousse au chocolat qu’elle avait faite la veille à la maison, puis on accrochait nos dessins sur les murs de sa cuisine, on repartait sales et fatigués. Mais des après midis chez mes grands parents, il y en a eu, aussi. On pouvait parfois être huit là bas. Je pense que c’est de là que viennent tous les liens que j’entretiens aujourd’hui avec tous mes cousins et mes cousines. Il y avait des clans avec ceux qui s’y retrouvaient systématiquement, mon cousin, sa sœur, une autre cousine, mon frère et moi. Les deux cousines aînées s’occupaient de la petite dernière, et mon cousin et moi on restait tous les deux, et comme elles ne voulaient pas qu’on approche le bébé, on se moquait d’elle, et ça nous faisait bien rire. Mon frère était le gardien des filles, et parfois, pour nous empêcher de les approcher quand elles étaient installées quelque part, il venait se battre avec nous. Puis mon grand père a fini par installer une balancelle dans le grenier de l’étable. Accrochée à une énorme poutre, avec de grosses ficelles usées, au dessus de l’enclos des chevaux, en plein milieu de la paille. On pouvait s’y installer tous ensemble, et ça réglait bien des choses. On avait tout déménagé là haut. Les jouets, de la vaisselle, nos goûters, nos devoirs. Quand on arrivait, on faisait le bisou pour dire bonjour aux adultes, puis on filait dans notre maison. On y était bien, et parfois, on restait des journées entières au dessus de tout le monde, jouant à tout et n’importe quoi, improvisant d’immenses cache cache dans les ballots de pailles qui nous donnaient les jambes toutes rouges et griffées et nous faisaient pleurer sous la douche du soir, et qui en plus, mettaient mon grand-père en colère parce qu’on enlevait les ficelles et que c’était très mal.
Alors, aujourd’hui, avec ces souvenirs, et il y en a encore beaucoup, je me dis que quand même, la période de mon enfance était très agréable, et elle me laisse aujourd’hui un goût très doux dans la bouche. Parce que même s’il n’y avait rien d’extraordinaire, je me rends compte que la simplicité était bien suffisante, et je crois que ça, je saurai m’en souvenir…